La 33ème édition du Salon des formations et métiers aéronautiques (SFMA) s’est tenue du 31 janvier au 2 février 2025 au musée de l’Air et de l’Espace au Bourget. Les centres de formation, les entreprises et les corps d’armée qui étaient présents ont observé une fréquentation toujours plus forte du public.
Aérométiers : informer, orienter et inspirer.
Parmi ces exposants, Airemploi en a profité pour dévoiler son nouveau nom Aérométiers et sa nouvelle identité visuelle. Nicolas Gros, son directeur, a confirmé la mission d’Aérométiers : informer, orienter et inspirer. L’occasion aussi de présenter les ambitions de l’association.
Aérobernie : Nicolas Gros, vous avez dévoilé un nouveau nom et une nouvelle image au grand public. Alors que l’association est devenue incontournable au fil du temps dans le paysage aéro, pourquoi ce changement ?
Nicolas Gros : Parmi nos actions, nous proposons un accompagnement individualisé, en étant toujours disponibles pour répondre aux demandes, organiser des rendez-vous et adapter notre approche à chaque public. Cette personnalisation est essentielle. Elle donne du sens à notre mission et inspire véritablement celles et ceux qui s’intéressent aux métiers de l’aéronautique.
Nous avons la chance d’évoluer dans un monde de passion, un secteur fascinant tant sur le plan industriel que commercial. Les entreprises qui le composent sont souvent pionnières et inspirantes, à la pointe de l’innovation. C’est aussi un secteur qui joue un rôle clé dans l’économie, grâce à ses performances et à son fort potentiel d’exportation. Il y a de nombreuses raisons de s’enthousiasmer et d’être porté par cette dynamique.
C’est dans cet esprit que nous avons repensé notre identité et notre baseline. Ce choix peut paraître évident, mais parfois, il est utile de rappeler ce qui est essentiel. Selon nous, il était nécessaire de moderniser notre image pour être en phase avec la dynamique et les perspectives d’innovation du secteur. L’ancien nom, Airemploi, et son identité visuelle ne correspondaient plus à cette réalité.
Par exemple, notre logo représentait encore un avion quadriréacteur qui a pratiquement disparu du paysage aéronautique. Ces détails, en apparence anecdotiques, reflétaient en réalité un certain décalage. Au-delà du simple changement de nom, il nous a donc semblé important de rénover notre identité pour mieux incarner la modernité et l’ambition du secteur aéro d’aujourd’hui et de demain.
Aérobernie : Vous êtes à la croisée des mondes associatif, éducatif, entrepreneurial, administratif et militaire, vous fédérez déjà beaucoup de monde…Comment pensez-vous pouvoir accompagner les ambitions du secteur ? Et quelles sont les vôtres ?
Nicolas Gros : Premièrement, en poursuivant le travail réalisé lors des 25 dernières années. Nous intervenons en milieu scolaire dans la France entière. Aérométiers compte une vingtaine d’experts et de professionnels de l’aéro qui animent près de 300 conférences par an. Rapporté à la taille d’une association comme la nôtre, c’est bien mais rapporté aux enjeux et au nombre d’élèves que nous pouvons encore sensibiliser à notre industrie, c’est encore peu. Il y a environ 6950 collèges et 3750 lycées en France.
Notre ambition est de passer de quelques centaines de conférences à quelques milliers d’ici 4 à 5 ans. Objectif : recruter plus d’intervenants pour être davantage présent dans les établissements au niveau national et pouvoir délivrer un certain nombre de messages sur la diversité des métiers.
Autre sujet essentiel pour nous : la féminisation de ces métiers ainsi que les enjeux autour de l’aviation bas carbone. Nous portons déjà toutes ces thématiques à travers des dispositifs qui fonctionnent très bien aujourd’hui, comme le programme « Terre & Ciel ».
Nous sommes dans une ère du tout numérique mais nous ne voulons pas abandonner le face-à-face et l’échange direct. C’est vraiment quelque chose qui plaît aux enseignants et aux élèves. On veut maintenir ce niveau de qualité et coordonner les efforts des divers acteurs de l’aéro. En les fédérant, on pourra atteindre à un objectif encore plus ambitieux.
Aérobernie : Entre l’échange direct et le présentiel, les moyens humains peuvent vite être limités. Il faudrait des centaines de conférenciers pour toucher le plus de monde possible…
Nicolas Gros : Effectivement ! Nous ne sommes pas encore suffisamment dimensionnés pour cela, du coup on mise beaucoup sur l’innovation en trouvant des supports qui nous permettent de compléter notre dispositif.
En diversifiant nos modes d’information, on améliore notre impact. Par exemple sur les deux dernières années, nous avons mené plusieurs projets en travaillant avec des médias « traditionnels » comme la presse écrite ou digitale, avec L’éléphant Junior ou Playbac Jeunesse.
Nous avons également développé des supports digitaux, des quiz sur l’aviation bas-carbone et sur la féminisation des métiers. Ce sont des supports qui fonctionnent très bien auprès des jeunes (et moins jeunes) et qui favorisent l’échange quand nous les déployons sur des salons ou des événements.
Aérobernie : Vous évoquez la féminisation des métiers de l’aéronautique au travers de vos outils d’information au jeune public. Avez-vous observé ces dernières années une tendance du secteur aéro à faire progresser ce taux de féminisation ?
Nicolas Gros : Je ne suis pas là pour vous dire que tout va bien. Il y a encore beaucoup de travail sur le sujet, on le sait. Il y a encore trop de sexisme dans notre société, nous devons être vigilants. Les mentalités doivent évoluer. Nous sommes là pour informer les jeunes filles que les métiers de l’industrie sont accessibles à tous et toutes, ouvrir le champ des possibles, ne pas se mettre de barrières et faire en sorte que les modes de fonctionnement changent au cœur de notre société.
Plus vite il y aura de mixité dans le monde professionnel, plus vite on arrivera à endiguer le problème du sexisme en général. Nous travaillons sur le sujet depuis un certain temps. En 2009, nous avons lancé le concours Féminisons qui est organisé tous les deux ans à l’occasion du Salon du Bourget. Mais c’est vrai, même si nous constatons une progression du taux de la féminisation sur les métiers de l’industrie, cela ne suffit pas. La progression reste trop lente, et il est nécessaire d’agir de manière continue.
C’est pourquoi, en décembre 2021, nous avons créé une charte dédiée à la féminisation des métiers de l’aéronautique. À ce jour, 29 acteurs majeurs du secteur ont signé cette charte, et très bientôt, nous atteindrons 30 signataires. Cette charte regroupe des administrations, notamment la DGAC, des fédérations professionnelles, les armées, ainsi que les grands industriels du secteur aéronautique, spatial et du transport aérien. Le domaine aéroportuaire est également représenté, ce qui constitue une véritable communauté engagée sur cette thématique.
Mais je tiens à rappeler que Féminisons, ce n’est pas qu’un label attribué aux entreprises, une étiquette qu’on affiche pour dire : voilà, j’ai signé ! C’est bien plus que cela, c’est un vrai engagement. Nous demandons aux signataires de participer activement à un groupe de travail permanent que nous animons.
Chaque mois, nous organisons des réunions en visioconférence et deux fois par an, nous réunissons les référents de ces entreprises et institutions pour mener des actions concrètes en commun et créer un observatoire de la mixité professionnelle.
Par exemple, en novembre dernier, nous avons organisé un événement autour du thème « Femmes de la Défense », avec quatre acteurs clés : Dassault, Safran, MBDA et l’armée de l’Air et de l’Espace. Cette journée de découverte des métiers a été complétée par des visites d’entreprises pour de jeunes collégiennes. Ce cluster continuera d’exister et de se développer.
Autre initiative, nous organisons chaque année à l’occasion du 8 mars, des rencontres sur la féminisation des métiers de l’aéronautique. La première édition s’est tenue chez Air France, la seconde chez Airbus à Toulouse, et en 2024 au sein du Groupe ADP. Cette année, nous accueillerons 300 élèves sur la base militaire 106 de Bordeaux-Mérignac. L’armée de l’Air et de l’Espace accueillera ces jeunes ainsi que les entreprises signataires. Des professionnelles exerçant des métiers souvent considérés comme genrés seront présentes pour échanger avec elles. Ce sera un grand moment, une très belle journée, j’en suis convaincu.
Par ailleurs, nous développons des ressources pédagogiques sur la féminisation des métiers. Par exemple, si vous vous rendez à la médiathèque du musée de l’Air et de l’Espace, vous y trouverez de nombreuses vidéos inspirantes de femmes exerçant dans le secteur. Ces vidéos ont été réalisées dans le cadre du programme Féminisons, grâce au financement des entreprises signataires et des opérateurs de compétences.
Aérobernie : Quand on parle d’ambitions, on a en tête des projets. Quels sont les vôtres pour accompagner le secteur sur le sujet de la transition ?
Nicolas Gros : Nous animons un groupe de travail permanent sur les métiers de l’aviation bas carbone. L’objectif est de répondre aux enjeux environnementaux et climatiques, qui sont aujourd’hui des préoccupations majeures du secteur.
Actuellement, nous vivons ce que l’on peut appeler la quatrième révolution de l’aéronautique. La première a consisté à faire voler des machines plus lourdes que l’air, un défi de taille à l’époque. La deuxième a été d’assurer ces vols dans des conditions de sécurité acceptables. Ensuite, la troisième révolution a permis la démocratisation du transport aérien, qui reste relative mais qui a profondément transformé notre manière de voyager. Aujourd’hui, nous sommes à l’ère de l’aviation bas carbone.
Face à cette transition, notre message aux jeunes générations est clair : ne voyez pas seulement le problème, mais rejoignez-nous pour construire la solution. Le monde de l’aéronautique a su se remettre en question à plusieurs reprises et s’adapter aux évolutions technologiques. Après trois révolutions réussies, nous sommes convaincus que nous pouvons réussir cette quatrième transformation. Nous encourageons donc les jeunes à s’engager et à participer à cette nouvelle ère du secteur aéronautique.
Pour mener ce projet, nous avons réuni huit grands acteurs du secteur : La DGAC (Direction générale de l’aviation civile), la FNAM (Fédération Nationale de l’Aviation et de ses Métiers), le GIFAS (Groupement des Industries Françaises Aéronautiques et Spatiales), le Groupe ADP, l’Union des Aéroports Français, Safran, Airbus et Air France. À l’avenir, nous comptons élargir ce cercle de partenaires afin d’intensifier notre impact et d’accélérer la transition vers une aviation plus durable.
Nous avons déjà initié plusieurs actions pour sensibiliser le public à ces enjeux. Lors du précédent Salon du Bourget, nous avons lancé une première série de courtes vidéos en motion design, inspirées des codes des jeux vidéo. L’objectif était de présenter de manière ludique les défis et les métiers liés à l’aviation bas carbone, tout en incitant les spectateurs à se rendre sur notre site pour découvrir ces métiers plus en détail. En parallèle, nous avons organisé des animations dans divers salons et forums, avec des quiz et des activités interactives pour engager le public sur cette thématique.
Aujourd’hui, nous préparons une nouvelle saison de ces vidéos. Nous sommes convaincus que cette thématique mérite d’être approfondie et développée avec de nouveaux partenaires. L’enjeu est immense et nous devons continuer à agir dès maintenant.
Interview réalisée par Nicolas Robineau
Prochain rendez-vous d’Aérométiers
Le prochain grand rendez-vous d’Aérométiers : le 11 mars sur la BA106 de Bordeaux-Mérignac pour la 4ème édition des Rencontres Féminisons.